Le 02/09/2012, J-8
Coucou à tous !
Certains s’en seront rendu compte, d’autres pas, mais globalement, le fait est que… En Rage de Toi sortira le 10 septembre donc dans 8 jours 🙂
Plusieurs d’entre vous m’ont demandé des extraits de mon livre et j’ai décidé d’organiser un petit truc jusqu’à la sortie.
À partir de demain, et jusqu’au 9 septembre, je posterai chaque jour un extrait du chapitre un ! À la fin de la semaine, le premier chapitre d’En Rage de Toi sera donc entièrement accessible sur cette page 🙂
Voilà, le premier extrait arrivera demain, j’espère que ça vous fait plaisir ^^
Bises à tous.
Le 03/09/2012, J-7
Voici le début du chapitre un, comme promis 🙂
Chapitre 1 :
— Surtout, tu appelles si tu as un souci ! En quarante minutes, on sera là, assura Vinciane.
Dans son short noir et son pull bleu marine couvert de poussière, la petite blonde donnait l’impression de sortir d’un vieux grenier. Le jeune homme à côté d’elle était tout aussi sale, mais beaucoup moins inquiet. Il passa une main dans ses cheveux bruns un peu longs et adressa un grand sourire à son interlocutrice.
— Ne t’en fais pas et maintenant que tout est nettoyé et que les meubles sont installés dans le bar et dans l’appartement, ça va aller…
Vinciane ne put s’empêcher de sourire à son employé. Josselin était travailleur et consciencieux malgré les apparences. Ses cheveux en bataille et son discret piercing noir à l’arcade sourcilière lui donnaient l’air d’un mauvais garçon et pourtant, c’était un jeune homme adorable. Vinciane avait peu à peu fini par se considérer comme sa grande sœur et le laisser seul dans le nouveau café qu’elle ouvrait à Lille lui donnait une vague impression de l’abandonner. Depuis plus de cinq ans qu’ils se connaissaient, ils avaient partagé beaucoup de secrets, de bons comme de mauvais moments, des fous rires… Elle se souvenait encore du chat errant qu’était l’adolescent de dix-huit ans qui avait passé la porte de sa brasserie d’Arras et du regard hanté qu’il avait alors. Josselin avait grandi et si parfois, il lui semblait revoir ce qu’il avait été, Vinciane savait qu’il avait avancé dans sa vie d’adulte. C’était aussi pour ça qu’elle avait voulu lui donner la charge du nouveau bar. Ne souhaitant pas s’éloigner de sa famille et de ses enfants, la jeune femme avait longuement hésité à ouvrir un deuxième café. Puis, en voyant Josselin travailler, elle avait décidé de lui donner sa chance et l’enthousiasme avec lequel il avait réagi l’avait confortée dans son choix.
Seulement, une fois les meubles installés, la plupart des travaux pour rendre le bar présentable terminés et l’enseigne du Marilyn fixée, elle commençait à se sentir anxieuse. Et si ça ne se passait pas aussi bien qu’elle l’espérait ? Et si Josselin n’arrivait pas à relever le défi ? Et si l’établissement ne parvenait pas à démarrer ? Le nouveau gérant devina les angoisses de sa patronne. Il l’attira à lui pour la serrer gentiment dans ses bras et lui embrasser le front qui arrivait juste au niveau de ses lèvres.
— Allez, Vinciane… t’en fais pas ! Ici, c’est super bien placé et la décoration est vraiment sympa… ça ne peut pas ne pas marcher. On a passé la journée à nettoyer tout ça, tu es fatiguée et je suis certain que rentrer chez toi et prendre un bon bain te ferait du bien. Surtout que tu n’es pas la seule à avoir besoin de repos.
— J’allais le dire, commenta une voix masculine appartenant à Xavier, son mari, qui les avait aidés tout au long de la journée à installer les tables, à nettoyer la poussière qui s’était accumulée dans tous les coins pendant les travaux et à installer les cartons dans l’appartement de Josselin au deuxième étage de l’immeuble où se trouvait le Marilyn. Il remonta ses lunettes sur ses yeux verts et eut un sourire. Aussi brun que sa femme était blonde, il avait une solide carrure qui contrastait avec l’apparence menue de Vinciane.
— On va rentrer et laisser Junior apprendre à vivre tout seul, déclara-t-il en s’approchant de son épouse.
Il lui passa un bras autour des hanches dans un geste de soutien déclenchant le rire franc de Josselin, qui se communiqua facilement à ses amis.
— Et puis au final, vous ne partez pas à l’autre bout du monde, Lille et Arras, c’est quoi… quarante minutes de voiture ?
— Sans compter que ton employé viendra t’aider demain, c’est ça ?
— Pascal ? Oui, normalement.
— Fais quand même attention avec lui, le mit en garde Vinciane.
Il l’embrassa sur la joue pour la rassurer, mais il était bien forcé de comprendre son inquiétude. Son futur serveur était en dépression depuis plus de deux ans suite au décès de sa femme et restait la plupart du temps enfermé chez lui. C’était sa fille de quinze ans qui s’était présentée suite à l’annonce de Josselin, une semaine auparavant, alors qu’il commençait à aménager le bar. Il n’avait pu s’empêcher d’écouter son histoire et malgré les mises en garde de Vinciane et ses propres doutes, il avait accepté d’engager Pascal qui cherchait un emploi depuis plus de six mois. Sa fille Anna avait fait tellement d’efforts pour le convaincre aussi… et la situation de cette petite famille était assez catastrophique pour finir par le décider. Il espérait vraiment ne pas le regretter, mais l’homme aux cheveux gris rassemblés en queue de cheval courte sur la nuque et aux yeux bleus ridés qui était venu se présenter par la suite lui avait inspiré confiance.
Le 04/09/2012, J-6 :
Josselin accompagna Xavier et Vinciane qui ne semblait pas vraiment rassurée jusqu’à la porte du café pour pouvoir la fermer derrière eux. Elle profita qu’il se mette à sa hauteur pour lui passer une main sur la joue et lui donner une dernière recommandation :
— Prends soin de toi surtout, et évite de sortir avec les clientes du bar, ça pourrait donner une mauvaise réputation à l’endroit.
— Promis, patronne !… seulement avec les clientes du café.
Elle rit doucement et lui donna une gentille petite tape. Il avait beau dire, elle savait qu’il s’était drôlement assagi ces derniers mois. Un an auparavant, c’était encore un séducteur invétéré qui changeait de fille aussi rapidement que de tee-shirt. Et elles ne lui résistaient pas vraiment. Il continuait bien sûr à voir des femmes mais son comportement avait changé : il ne draguait plus les clientes qui venaient au Grand Secret, la brasserie de Vinciane à Arras, il n’essayait pas vraiment d’aller au-devant d’elles mais attendait plutôt que l’on insiste auprès de lui. Ce comportement avait fini par inquiéter un peu sa sœur de substitution qui faisait aussi office de chef, mais peut-être était-ce simplement sa façon de grandir ? Étrangement, elle n’y croyait pas vraiment. C’était aussi ça qui la rendait anxieuse : les changements chez son ami… Mais elle voulait lui faire confiance. Il s’était vraiment investi pour trouver les futurs locaux du bar, implanté dans une petite rue entre la gare Lille Flandres et la Vieille Bourse de Lille, un endroit idéal, avec beaucoup de passage, vivant et empli d’étudiants qui sortaient des bancs de la faculté. Si Josselin y trouvait une stabilité et réussissait à faire fonctionner le Marilyn, elle ferait tout pour l’aider. D’autant plus qu’elle était certaine que son bar de Lille lui permettrait d’avoir un chiffre d’affaires confortable et ainsi de faire rentrer autant d’argent qu’elle avait dû en dépenser…
— Fais attention, intima Xavier à Josselin avant de prendre le jeune homme dans ses bras et de lui taper l’épaule dans un geste qui se voulait fraternel et qui dénotait un vrai sentiment d’amitié entre les deux hommes.
Puis ils se séparèrent et le plus âgé prit le bras de sa femme pour l’emmener vers sa voiture stationnée un peu plus loin dans la rue. Il les regarda s’installer dans l’habitacle avant de s’éloigner rapidement dans les rues de Lille et se décida enfin à rentrer à l’intérieur des locaux. L’ambiance résolument moderne dans les tons chocolat et argenté lui ressemblait et il passa une main sur le bar en inox, les lèvres étirées en un sourire de gamin ayant reçu le jouet de ses rêves. Tout était comme il l’avait imaginé : les chaises et les tabourets en bois naturel sombre étaient de la même teinte que les tables, les lambris des murs avaient été conservés mais repeints en argent pour mieux ressortir sur le marron tout en préservant un peu du patrimoine du bâtiment. L’ancien carrelage aussi était encore là, donnant un cachet à la pièce avec ses fleurs vertes et roses un peu passées. Le Marilyn était vraiment beau à voir. Il restait encore à aménager la cave comme il le souhaitait. C’était un vaste espace auquel on accédait par un escalier d’acier en colimaçon au fond du café, près du bar. Assez basse de plafond, la pièce avait des murs en briques rouges typiques de la région, offrant un espace sous des voutes qui renvoyaient admirablement le son. Dans peu de temps y seraient installées une petite scène et des banquettes pour y organiser des concerts ou des spectacles. Il avait fait appel à une petite entreprise spécialisée dans l’insonorisation et la décoration de salles de spectacle : Liam, le fils du patron de la société, arriverait tôt le lendemain matin pour commencer les travaux. Mais pour ça, encore fallait-il que Josselin se décide à regagner son nouveau chez lui, à se faire à manger et à se mettre au lit.
Il prit le temps de fermer la porte du Marilyn et d’éteindre les lumières avant de revenir vers le fond du bar pour monter les marches menant à son logement. En rachetant les locaux commerciaux, Vinciane avait acquis l’appartement situé au-dessus du bar pour y loger son employé. Ce dernier ne pourrait ainsi jamais être en retard. Josselin monta les escaliers dans le noir, assez idiot et fainéant pour ne pas allumer la lumière et risquer de se casser la figure. Lorsqu’il arriva à l’étage, il ouvrit la porte sur son nouveau lieu de vie. L’appartement comportait une vaste pièce dans les tons gris ouverte sur la cuisine, ainsi qu’une chambre à laquelle on accédait par une porte au fond du salon. Si quelques meubles avaient pu être montés, la majorité de ses affaires se trouvaient encore dans des cartons dispersés dans chaque pièce. Il prit le temps de récupérer un jean propre et un tee-shirt ainsi que sa trousse de toilette dans la chambre aux murs blancs avant de rejoindre la salle de bain carrelée de blanc et bleu. La pièce était un peu exiguë, d’autant qu’il avait choisi d’y installer sa machine à laver, mais pour lui tout seul, ça suffisait amplement. Il prit une douche rapide et se rhabilla, car s’il voulait manger, il allait devoir passer à la supérette du coin pour acheter le plus urgent.
Être propre lui donna presque l’impression d’avoir fini de s’installer, mais sa trousse de toilette de voyage ouverte sur le bord du lavabo lui rappela bien vite la réalité : tout était encore à ranger. Il poussa un soupir, tenta de se convaincre qu’il aurait le temps de le faire le lendemain et se coiffa rapidement avec les doigts, sa tignasse ayant de toute façon la sale habitude de ne jamais se laisser discipliner. Après un rapide passage dans le salon, il enfila son gilet préféré en mailles noires et descendit les escaliers toujours plongés dans l’obscurité. Il traversa ensuite le café et finit par déboucher sur la rue. La porte verrouillée derrière lui, il commença à avancer tout en appréciant les bruits de la ville. Lille était différente d’Arras mais il y avait une ambiance dans ses rues, typique des villes du Nord, que Josselin appréciait particulièrement. Malgré la fraîcheur habituelle du mois de novembre, il y faisait toujours chaud.
Le 05/09/2012, J-5 : Extrait court aujourd’hui ^^’
Il fouilla tout en marchant dans la poche de son gilet pour trouver son portefeuille et surtout sa carte bancaire vu qu’il devait retirer un peu d’argent au distributeur. Au moins de quoi s’acheter son repas du soir et des viennoiseries à la boulangerie pour accompagner son café le lendemain matin. Concentré sur sa tâche et ses projets, il en oublia de regarder devant lui et percuta assez violemment une jeune femme qui tituba en se tenant l’épaule avec une grimace de douleur. Il l’attrapa par le bras pour lui éviter de tomber en arrière à cause de ses chaussures à talons hauts et murmura :
— Pardon, je regardais ailleurs.
Des yeux d’un bleu presque translucide le fixèrent d’abord avec stupeur puis avec une once de colère. C’est cette dernière émotion qui fit sourire Josselin. La jeune femme aux longs cheveux bruns serrés en un chignon sévère sur la nuque et vêtue d’un tailleur avait tout de la cadre stressée. La colère et le côté un peu coquin en prime.
— J’ai bien vu que vous ne regardiez pas ! Lâchez-moi maintenant !
Josselin s’exécuta sans se départir de son sourire. Cela faisait un moment qu’il n’avait pas ressenti le besoin de taquiner une jolie inconnue pour tester son charme mais là, le défi le tentait bien.
— Plus de peur que de mal… et peut-être un mal pour un bien…
Elle le regarda un peu éberluée et poussa un grognement manquant clairement d’élégance.
— C’est ça, oui… Je suis pressée.
— Même pas le temps de prendre un verre ?
Technique de dragueur de bas étages, mais il voulait tout de même la tenter, conscient que l’inconnue était sur le point de lui échapper. Et ça l’agaçait. Il n’était cependant pas le seul à ressentir ce genre de choses, comme semblait l’indiquer l’expression exaspérée venant de passer sur le mignon petit minois de celle qu’il avait bousculée.
— T’as rien d’autre à faire de ta vie ? lui demanda-t-elle en commençant à le détailler de bas en haut avec une moue dédaigneuse. Va plutôt essayer de te trouver un boulot, bon à rien.
Elle se détourna de lui, le laissant un peu sonné au milieu du trottoir. Il avait déjà été repoussé par des femmes, mais rarement avec autant de virulence. Il se passa une main sur la nuque, quelque part un peu gêné, puis se rendit enfin compte que son portefeuille était par terre et ouvert sur sa carte bleue. Il le ramassa tout en laissant échapper un soupir et regarda la photo sur sa pièce d’identité. D’un coup, il eut envie de rattraper la jeune femme pour lui dire qu’il n’était pas un bon à rien, qu’il ouvrait un café, qu’il avait des projets. Mais qu’est-ce que cela aurait bien pu changer pour lui ou pour elle ? Pas grand-chose… Il alla donc plutôt retirer son argent tandis qu’au loin, une femme poussait les portes de la gare de Lille Flandres.
Le 06/09/2012, J-4 : Un peu plus tôt que d’habitude, voici la suite 🙂
Juliette était plus qu’énervée, parce qu’elle avait passé une journée horrible au bureau à cause de l’humeur exécrable de son chef, mais aussi parce qu’elle avait fini par passer ses nerfs sur un jeune inconnu. Elle se savait d’un caractère assez explosif, mais ce n’était pourtant pas dans ses habitudes de s’en prendre comme ça à des passants qui avaient le malheur de la bousculer. D’autant plus quand ces derniers s’excusaient, même s’ils draguaient aussi mal… Surtout qu’au final, le brun aux cheveux ébouriffés qu’elle avait vu n’était pas si peu soigné qu’elle l’avait laissé entendre. Alors qu’elle arrivait sur le quai du tramway menant à Roubaix, elle commença à se ronger les ongles en réfléchissant.
Dernièrement, ses journées n’en finissaient plus et son patron était de plus en plus agaçant. Secrétaire d’un chef d’entreprise travaillant dans le textile, elle avait toujours trouvé son travail assez calme jusqu’à ce que son supérieur négocie un gros contrat avec un grand groupe de vente de vêtements par correspondance. L’afflux de commandes mettait Monsieur Castagne dans un état de stress permanent qu’il communiquait à tous ses employés, en particulier à la plus proche de lui : Juliette. Alors quand elle sortait du bureau, non loin de la Vieille Bourse de Lille, elle marchait rapidement jusqu’à la gare, ne voulant qu’une seule chose : rentrer chez elle, s’installer devant la télévision et se détendre. La jeune femme constata en soupirant qu’elle venait encore de gâcher sa manucure puis monta dans le tramway qui venait d’arriver. Elle devrait encore se faire à manger en rentrant. À moins qu’elle n’en ait même plus le courage… Plus les arrêts défilaient et plus elle se sentait fatiguée. De toute façon, depuis qu’elle avait quitté sa famille six ans auparavant pour venir s’installer à Lille, elle ne mangeait pas vraiment correctement. Ce fait agaçait beaucoup sa sœur Esther qui ne pouvait au final pas faire grand-chose de New York, où elle était partie pour son travail de conceptrice de jeux vidéo. Cette dernière avait d’ailleurs tenté de la convaincre de venir avec elle aux États-Unis et d’essayer de faire carrière dans la musique, mais Juliette avait toujours refusé, préférant s’entêter dans ses études de secrétaire plutôt que de mettre à profit ses talents de musicienne. N’ayant jamais pris de cours, elle était autodidacte et avait travaillé durant toute une année avant de pouvoir se payer une guitare. Elle avait ensuite appris à jouer du violon en aidant une vieille dame passionnée pendant son temps libre. Cette dernière lui avait légué son instrument à sa mort. Pour une jeune femme qui s’était toujours débrouillée par elle-même, l’idée même de dépendre de sa grande sœur le temps de pouvoir percer dans le monde musical lui semblait tout simplement inenvisageable. Travailler en tant que secrétaire ne rapportait pas énormément, mais elle n’était dépendante de personne pour se loger ou même pour manger. Sur ce dernier point néanmoins, ce n’était pas qu’une bonne chose : il lui arrivait de ne pas avoir la force de cuisiner en rentrant du travail. Et au vu du peu d’énergie qu’elle avait en descendant du tramway à l’arrêt Buisson de Marcq-en-Barœul, elle allait encore se contenter d’engouffrer un paquet de biscuits avec un thé bien chaud et bien sucré. Elle passa devant un petit café à l’angle de la rue, puis franchit un rond-point. Mais plus elle avançait, plus elle avait la désagréable impression de marcher au ralenti. Elle gravit lentement les marches de son petit immeuble avant d’ouvrir la porte de son appartement avec un soupir de soulagement. Une boule de poils grise vint aussitôt se coller contre ses jambes en ronronnant tout son soûl. Elle le repoussa gentiment du pied :
— Onyx pousse-toi… Laisse-moi fermer la porte et je te donne à manger…
Le 03/09/2012, J-3 : ça se rapproche !!!
Elle parvint tant bien que mal à fermer la porte tandis que le félin abandonnait quelques poils sur ses bas en se frottant à ses mollets. Elle opta alors pour la seule solution qui lui permettrait de se débarrasser du pot de colle et se dirigea vers la cuisine dans le but de le nourrir au plus vite. Mais comme si le monde entier se liguait contre elle pour l’empêcher de se reposer, on sonna à la porte. Elle s’évertua alors à éviter de donner un coup de pied au chat pour pouvoir ouvrir et finit par trébucher contre le tapis, se rattrapant de justesse au montant de la porte. Le sourire de Gaëlle, une voisine de l’étage du dessous, lui indiqua bien que la jeune métisse aux grands yeux verts avait compris ce qui s’était passé. Cette dernière se baissa pour caresser le chat qui accueillit la visiteuse avec un concert de ronronnements. Juliette grimaça en voyant les poils s’accumuler sur le pantalon noir de son amie, puis sur son petit pull en laine rose.
— Désolée pour tes vêtements, Gaëlle… Onyx est un peu collant…
— T’en fais pas, j’ai l’habitude. Je t’ai entendue dans l’escalier et comme j’ai travaillé toute la semaine, j’ai pas eu le temps de venir te voir avant…
Les deux jeunes femmes s’étaient immédiatement bien entendues après que Juliette se soit spontanément proposée pour aider Gaëlle à monter quelques cartons chez elle le jour de son emménagement dans l’immeuble deux ans auparavant. La nouvelle venue l’avait alors invitée à manger pour la remercier. De fil en aiguille, elles étaient devenues amies et se rendaient de multiples petits services. Malgré son travail d’aide-soignante qui imposait à la jeune métisse des horaires un peu décalés, les deux femmes s’arrangeaient pour se voir au moins une fois par semaine.
Le 08/09/2012, J-2 : OMG OMG !
Juliette se baissa et prit son chat dans ses bras pour laisser entrer Gaëlle.
— Je vais faire du café…
— Oh te donne pas la peine, je dois aller rejoindre ma famille pour dîner. Je voulais juste savoir si tu venais demain soir chez Mathias ?
Elle lui sourit et hocha la tête avant de répondre :
— Évidemment. Je ne vais pas manquer ça.
Avec un groupe d’amis, ils avaient pris l’habitude de se réunir pour jouer de la musique tous ensemble.
— Tu ramènes ton violon demain ? On a vraiment envie d’entendre ce que ça donne sur le morceau dont on a parlé.
— Oui, t’en fais pas.
Gaëlle regarda sa montre-bracelet et déclara :
— Allez, je dois te laisser. Mes parents disent déjà qu’ils ne me voient plus. Si en plus j’arrive en retard…
— À demain alors, la salua Juliette alors que son amie descendait déjà les marches.
Onyx se manifesta bruyamment une nouvelle fois, miaulant pour se rappeler au bon souvenir de sa maîtresse. Le pauvre avait été complètement oublié et son ventre criait famine…
Le 09/09/2012, J-1 : Ouah ! Le stress total !!! C’est demainnnnnnnn !
À quelques kilomètres de là, Josselin s’affairait dans sa petite cuisine pour combler sa fringale. Des légumes coupés en dés sautaient dans son wok avec des morceaux de dinde. Le jeune homme avait développé un goût pour la cuisine en travaillant pour Vinciane dans sa brasserie d’Arras qui proposait une carte simple, avec des prix qui défiaient toute concurrence. Cela attirait énormément de clients, mais la patronne avait vite perdu la patience nécessaire pour travailler avec son époux en cuisine, et ayant lui-même l’habitude de faire à manger avec un petit budget, Josselin avait alors pris le relais. Il s’était rapidement révélé bon cuisinier et tout le monde regrettait à présent son départ pour Lille.
Il mit les légumes et la viande dans une assiette puis s’essuya les mains sur le torchon qu’il avait la manie de coincer dans sa poche. Son repas en main ainsi qu’un verre d’eau qu’il venait de se servir, il se dirigea vers son nouveau salon. Un carton lui servit de table basse pour manger alors qu’il était assis en tailleur par terre pour être à la bonne hauteur et déballer ses affaires en même temps. Entre deux bouchées, il sortit sa collection de CD qui iraient prendre place près de sa chaîne hi-fi. Vinrent ensuite des housses pour les coussins du canapé, puis une collection de télécommandes en tout genre : télévision, lecteur DVD, console de jeu,… Il passa une dizaine de minutes à vider le carton puis en ouvrit un autre avant de se figer pendant quelques secondes à la vue d’un simple bout de tissu servant à emballer un bien et ainsi à éviter la casse lors du voyage. Sa transe prit fin quand sa main s’approcha du carton et que ses doigts effleurèrent le tissu avant de vraiment se saisir de l’objet. Il libéra le cadre de sa protection avec délicatesse, laissant apparaître une photo de lui, beaucoup plus jeune, auprès d’une jeune femme brune qui lui souriait avec tendresse. Cela faisait presque six ans, mais la douleur restait désespérément la même. Il avait parfois l’impression d’oublier, que le souvenir de Valérie s’estompait, mais un détail de la vie quotidienne, une image, une parole, venait raviver le brasier qui le faisait tant souffrir. Son sourire, ses grands yeux marron, son air mutin, ce tic qu’elle avait d’enrouler une de ses longues mèches brunes autour de son doigt quand elle réfléchissait, autant de choses qui avaient disparu avec elle mais dont le souvenir était étonnamment clair. Avec un soupir, il se leva, délaissant son assiette et les cartons pour aller poser le cadre sur sa nouvelle bibliothèque. Ou qu’il aille, quoi qu’il fasse, elle était là. Il avait beau fuir à Arras ou même à Lille…
Il chassa d’un doigt une poussière imaginaire sur le cadre, en un geste ressemblant beaucoup à une caresse, avant de s’en détourner pour rejoindre le couloir. Laissant tout en l’état, il appuya sur l’un des interrupteurs du salon, plongeant le petit appartement dans la pénombre. Il se déshabilla à la lumière des réverbères de la rue et se laissa tomber sur le lit. Il n’était même pas neuf heures du soir mais il avait déjà l’impression que la journée avait été beaucoup trop longue…